En Belgique, le mouvement lycéen et étudiant commence à s’organiser. Des AG se font dans de nombreuses villes, d’abord pour structurer le mouvement ensuite pour discuter des revendications. C’est une bonne chose. En Suisse le mouvement c’est organisé plus vite que chez nous. Qu’est-ce qu’on peut en apprendre ? Une contribution d’un lycéen de Genève.


Quelle est l’utilité d’un comité? Quel rôle devrait-il jouer? Comment l’élire? Ce sont ces questions, entre autres, qu’occupent les militants du mouvement “étudiants pour le climat”. À partir des expériences faites et au vu de la deuxième AG (mardi 12.02, 18:30, Uni Mail) nous proposons dans cet article des pistes de réponses. Pour nous il est clair: le renforcement des structures démocratiques n’est pas un but en soi mais une condition nécessaire pour pouvoir développer notre analyse et trouver une bonne stratégie de lutte.

“Si les solutions ne peuvent être trouvées dans le système actuel, un changement de système est nécessaire.” Des milliers de jeunes à Genève et partout dans le monde réclament des mesures radicales face à la crise écologique et anticipent la nécessité de dépasser le capitalisme. Les collégiens et autres étudiants, conscients de ce problème avec lequel ils ont grandi et qui déterminera leur futur, font de moins en moins confiance à la politique institutionnelle pour régler cette crise. Parmi eux, de plus en plus en ont marre des beaux discours appelant au dialogue, aux pétitions ou aux traités. Cette radicalisation est extrêmement positive car pour sortir de la crise écologique il est impératif de dépasser le capitalisme.

En effet, sa logique de profit illimitée et son mode de production anarchique en font un système profondément non-durable. Seule une production planifiée et durable répondant aux besoins des gens et de la nature nous permettrait de passer effectivement aux énergies renouvelables et d’endiguer le réchauffement climatique.

Comment lutter et contre qui ?

etat urgence climatOr, ce changement ne se fait ni d’un claquement de doigts, ni en quelques manifestations symboliques. C’est un processus qui demande une bonne analyse des causes de la crise écologique et une excellente organisation. Les bases cruciales d’un mouvement qui voudrait agir efficacement pour la préservation de l’environnement sont donc de savoir comment et contre qui lutter. Le mouvement étudiant genevois pour le climat a fait preuve à plusieurs reprises de bonnes analyses. Par exemple, le réflexe d’étendre le mouvement au-delà du simple milieu étudiant était une décision correcte : seuls, les étudiants ne disposent pas du pouvoir de paralyser l’économie et de la transformer. Mais l’analyse reste largement limitée : quand les étudiants se sont aperçus dans un sondage du 20 Minutes que 59% des lecteurs pensaient que les grévistes auraient mieux fait de rester en cours, ils appelèrent uniquement à voter massivement pour renverser la tendance du sondage plutôt que d’en conclure qu’il était surtout nécessaire de convaincre le reste de la société qu’ils avaient les mêmes intérêts dans la lutte pour le climat.

Pas de bonne analyse sans démocratie

La première assemblée générale du mouvement genevois (fin janvier, presque 100 participants) a montré qu’à travers un cadre permettant un débat ouvert d’idées, nous pouvons pousser plus loin nos réflexions et donc nos positions. Nos camarades y ont, entre autres, démontré la nécessité de tisser des liens avec les salariés qui eux disposent du pouvoir de bloquer l’économie et ainsi de la transformer. Ce point de vue a largement été soutenu par les militants généralement très sérieux et hautement concentrés. Jusqu’à cette première AG, il y avait un manque flagrant de démocratie au sein du mouvement. Les décisions étaient prises par un groupe fermé d’individus non-élus et irrévocables par l’ensemble du mouvement. Certes, ils ont le mérite d’avoir lancé le mouvement et d’avoir contribué indéniablement au succès de la première grève. Mais, censés représenter au départ les membres de leur établissement scolaire, ils se sont progressivement substitués à ceux-ci. La base du mouvement n’était consultée sur aucune décision et son rôle était réduit à lire les procès-verbaux.

La nécessité d’une direction élue

En réponse à cette bureaucratisation, plusieurs étudiants ont appelé lors de l’AG à des structures purement horizontales. Le débat entre centralisme démocratique et anarchisme n’est pas qu’une question organisationnelle, elle est profondément liée à la tâche politique du mouvement. Les structures anarchistes, basées sur le consensus horizontal et non pas sur la délégation, ne permettent pas une réaction suffisamment rapide et causent même des manques de démocratie. En effet, si le mouvement n’a pas de direction élue, révocable et devant rendre compte de ses décisions devant la majorité en assemblée, les décisions continuent de facto d’être prises par une direction informelle et non-élue. De plus, la politique du consensus ne produit que des assemblées interminables qui ne débouchent sur aucune action concrète. Ici aussi, la position mise en avant de nos camarades a été adoptée – un comité sera élu.

Pour un débat ouvert entre tout le monde

Un débat non résolu tourne autour de la question de la participation des partis politiques au mouvement. Se réclamant apartisan, il est allé jusqu’à empêcher le droit de vote aux militants organisés. Il semble exister une confusion entre la politique institutionnelle (qui, elle, n’offre en effet aucune solution à la crise écologique) et n’importe quelle autre association ou groupe politique, si révolutionnaire et anti-système soit-il. Bien que cette haine de la politique institutionnelle soit saine et légitime, refuser en bloc et par principe toute organisation revient à se tirer une balle dans le pied. En effet, certaines organisations ont de nombreuses années d’expériences dans la lutte ; elles ont pu, au cours de celles-ci, élaborer et accumuler de pertinentes analyses sur la façon de dépasser le capitalisme, sur des perspectives et des programmes théoriques précis. Interdire à quelqu’un d’afficher ses affiliations à une organisation est à la fois une atteinte à la liberté d’expression et une confusion qui empêche de savoir “d’où l’on parle”. Bref, ce n’est pas en interdisant le débat ouvert entre les militants (organisés ou pas) que l’on produira de bonnes analyses révolutionnaires. Bien au contraire, le débat ouvert est une condition pour pouvoir les développer.

Il faut une organisation révolutionnaire!

Dans l’urgence que représente la crise climatique, une organisation défendant un programme révolutionnaire est indispensable pour conserver les expériences accumulées et ainsi établir l’unité dans la lutte pour le climat et contre le capitalisme. Pour aller jusqu’au bout, c’est à dire pour mettre fin au capitalisme, la convergence des luttes et l’engagement à long terme de la jeunesse radicalisée dans une organisation révolutionnaire est nécessaire. Nous vous invitons donc à rejoindre l’étincelle! Aidez à bâtir une organisation – en théorie et en pratique !